Jusqu'en 1822, ce qui deviendra le Kauwberg est situé en
bordure d'une bande forestière étroite de la Forêt Domaniale de Soignes. A cette date,
la forêt fut cédée par les Pays-Bas à la Société Générale des Pays-Bas 'pour
favoriser l'industrie nationale'. Après la révolution de 1830, la Société Générale,
craignant sans doute qu'on ne conteste ses droits de propriété sur ladite forêt, en
décida le lotissement et la vente. C'est ainsi qu'une partie des zones correspondant à
l'actuel Kauwberg fut morcelée et vendue à des propriétaires privés (in 'Le Kauwberg:
visages d'hier et de toujours'; 1991).
Actuellement, le site est divisé en de nombreuses parcelles appartenant à différents
propriétaires (voir transparent superposable à toutes les cartes présentées dans ce
travail). Nous avons joint en annexe la liste des différentes parcelles avec leurs
propriétaires respectifs.
Le classement récent d'une grande partie du site est
l'épisode le plus récent d'une longue série d'événements juridiques dont nous
rappelons les moments les plus significatifs.
Le 29 mars 1976, le projet de Plan de Secteur englobe la
plupart des terrains du Kauwberg dans un programme d'habitat entourant une zone verte de 5
ha située aux alentours de la carrière. Le Plan de Secteur du 26 novembre 1979 classe la
majeure partie du Kauwberg en 'zone de réserve foncière'. Seule une zone située à
l'Est du Kauwberg I bordant l'avenue Dolez, est inscrite en zone d'habitation et est
aujourdhui quasi totalement bâtie. Dans le périmètre de la zone de réserve, il
existe de plus 5 petites zones d'habitation également bâties.
Le 16 décembre 1988, le Conseil Communal d'Uccle décide d'établir un plan particulier
17bis qui devra affecter une superficie d'au moins 30 ha à un parcours de golf de 18
trous. Devant la levée de boucliers provoquée par cette décision, le PPA sera
finalement retiré. Les défenseurs du site ont joué un rôle primordial à cette
occasion.
Il faut rappeler que tout changement d'affectation proposé par la commune sous forme d'un
PPA doit être motivé par la nécessité d'effectuer ce changement, pour la sauvegarde de
l'intérêt général. Cette nécessité n'était pas démontrée clairement dans ce cas
précis. Précisons également que pour entrer en vigueur, tout PPA approuvé par le
Conseil Communal doit être aussi approuvé par un arrêté royal.
C'est aussi à cette époque qu'est introduite une nouvelle demande de classement par. les
défenseurs du site, suite à la mise en évidence du grand intérêt biologique du lieu.
Un arrêté royal du 3 avril 1989 prévoit l'expropriation d'une superficie de 20 ha du
site en vue de le protéger comme espace vert semi-naturel. Cet arrêté n'a jamais été
exécuté et vient même d'être retiré récemment (novembre 1994).
Une procédure de jumelage avec le vaste site d'Hampstead Heath à Londres a été
entamée par l'association S.O.S. Kauwberg en 1990; elle suit son cours actuellement.
C'est dans le courant du mois d'avril 1994, que la Région
Bruxelloise décidait de classer une partie importante du périmètre du Kauwberg (le
périmètre classé est délimité en noir sur le transparent joint au travail).
Une cinquantaine de sites ont à ce jour été classés en région bruxelloise; il s'agit
essentiellement de parcs, de bois et jardins, voire de terrains entourant des bâtiments
classés comme monument. La majorité des sites classés sont des propriétés publiques,
à de rares exceptions près: c'est le cas du Kauwberg.
La portée juridique de cette protection a souvent été assimilée à une interdiction
totale d'y faire quoi que ce soit, en particulier d'y construire (SCHOONBROODT, 1993). En
fait, c'est la nouvelle ordonnance relative à la conservation du patrimoine immobilier du
4 mars 1993 qui définit les règles en la matière. Un point important de cette
ordonnance est la suppression du régime des indemnités automatiques aux propriétaires
en cas de classement, il s'agit d'une volonté délibérée du Secrétaire d'Etat D. van
Eyll qui a fait valoir que 'la Région n'a pas les moyens de prévoir simultanément
un mécanisme de subsidiation des travaux aux bâtiments classés et un système
d'indemnisation' et que le texte 'prévoit une possibilité de subvention pour
les travaux à effectuer aux sites classés, ce qui n'existait pas dans la loi de 1931'
. Enfin, il existe 'la possibilité réservée aux propriétaires de réclamer
l'expropriation'.
Il faut souligner que les procédures d'octroi de subsides et d'expropriation ne sont
envisageables que dans l'hypothèse où l'exécution de travaux de conservation
indispensables au maintien de l'intégrité du site sont jugés nécessaires (SCHOLASSE,
1993). De plus, à défaut pour le propriétaire d'un bien classé de réaliser les
travaux de conservation nécessaires, l'ordonnance stipule que la Région ou la Province
ou la Commune peut se substituer au propriétaire défaillant, ces instances pouvant
recueillir les subsides et au besoin récupérer les frais exposés auprès du
propriétaire.
Par ailleurs, le propriétaire d'un bien classé bénéficiera désormais d'un certain
nombre d'avantages au niveau fiscal. D'une part il sera immunisé du précompte
immobilier; d'autre part, au cas où il léguerait son bien classé à la Région ou à
une fondation ayant le statut d'établissement d'utilité publique au sens de la loi du 27
juillet 1921, ce legs sera exempt des droits de succession et de mutation par décès (OST
et al., 1993).
L'ordonnance impose également aux propriétaires une
obligation d'entretien du site classé ainsi que le respect des conditions particulières
fixées par l'ordonnance et par l'arrêté de classement.
Remarquons que la notion importante d'entretien d'un site naturel ou semi-naturel n'a
toujours pas été clairement définie depuis la date de cette ordonnance. Assurément
c'est une question qui risque de provoquer de longs débats. Les travaux préparatoires de
l'ordonnance restent en effet muets sur ce point.
Au vu de tous ces renseignements, il n'est pas étonnant que
le classement récent du Kauwberg ait provoqué une certaine effervescence. Mais comme le
suggère M. Scholasse, il est à souhaiter qu'au travers de cette nouvelle ordonnance, les
propriétaires d'immeubles relevant du patrimoine immobilier prennent conscience de la
valeur de leurs immeubles et du rôle que ces derniers jouent dans le maintien et
l'augmentation de la qualité de la vie en ville.
Il reste à dire que le périmètre de classement choisi est peut-être un peu surprenant
puisqu'il ne reprend pas certaines zones d'intérêt écologique important comme la lande
à genêt et la pelouse silicicole, toutes deux situées dans la partie Ouest du Kauwberg:
il aurait sans doute été souhaitable de classer l'entièreté du site, le Kauwberg II
compris. Cette lacune pourrait être comblée par une procédure d'inscription sur la
liste de sauvegarde des biens immobiliers qui assurerait une protection
presqu'équivalente à un classement, de l'ensemble de la zone non classée.
Terminons en disant que le statut du Kauwberg pourrait aussi être modifié lors de la
concrétisation au début de l'année 1995 du Plan Régional de Développement (P.R.D.).